Synopsis:
« Dark Star » est un vaisseau spatial chargé de détruire les planètes qui encombrent le système solaire. Alors qu’il s’apprête à lancer une nouvelle bombe, une avarie se produit.
Qu’on le considère comme un simple film de fin d’études ou comme le premier film de la brillante filmographie de John Carpenter, Dark Star est un drôle d’objet. Nanar spatial pour les uns et compagnon idéal d’une fin de soirée alcoolisée avec quelques potes, relique pour les plus fervents « Carpenteriens » (dont l’auteur de ces lignes fait partie) toutefois conscient des défauts de la bête, le premier enfant de Big John revient en pleine lumière depuis quelques années après avoir été longtemps condamné à rester enfermé dans sa chambre. Edité en DVD à la fin des années 90 puis en Blu-ray dans une très belle édition collector (sortie en 2014), Dark Star reçoit les honneurs d’une projection sur grand écran dans le cadre du Festival Chic Planète. C’est le genre de séance qu’il nous était impossible de manquer même si le grand écran ne transforme pas en chef d’oeuvre, ni même en grand film, un tout petit film extrêmement sympathique.
Entre la comédie spatiale dépressive et la parodie des grandes références de l’époque, on pense en premier à 2001 l’odyssée de l’espace, Dark Star n’a pas réellement d’autre ambition que d’être un laboratoire à idées, un galop d’essai pour John Carpenter et son co-scénariste Dan O’Bannon qui quelques années plus tard signa le scénario d’Alien. Les deux compères étaient alors étudiants en dernière année de cinéma à la USC (University of Southern California) et durent composer avec un minuscule budget pour réaliser ce qui n’était alors qu’un moyen métrage (45 minutes) de fin d’étude. C’est à la fin de leurs études que John Carpenter trouva le financement pour en faire un long métrage et Il signa lui même la bande originale qui avec ses nappes de synthétiseur est déjà caractéristique de celles que l’on retrouvera dans ses autres films. Dark Star est aussi sa première collaboration avec Tom Lee Wallace qui sera son directeur artistique sur Halloween et The Fog. Tous les ingrédients présent dans ce film sont ainsi excellents, seul manque alors encore l’expérience et un budget décent.
Fait de bouts de ficelles mais avec une envie et un plaisir communicatif, Dark Star enchaîne rapidement les répliques et les scènes cultes portées par 4 acteurs complètement dans le ton qui composent un hilarant équipage de bras cassés. Doolittle (Brian Narelle), Boiler(Carl Kuniholm) , Talby (Dre Pahich) et Pinback (Dan O’Bannon) sont des cols bleus de l’espace envoyés dans une mission de très longue durée pour repérer et détruire les planètes dont les orbites instables représentent une menace. On comprend dès le début du récit qu’ils sont livrés à eux mêmes dans cette navette, un message d’un responsable de la mission les informant que leur requête de remplacement du bouclier anti-radiation a été refusée suite à des coupes budgétaires. Doolittle est celui qui prend le plus à cœur cette mission même s’il se comporte plus comme un enfant impatient d’ouvrir son cadeau que comme un lieutenant soucieux de bien s’acquitter de sa tâche. Détruire des planètes en y larguant une grosse bombe, voilà ce qui procure le plus de frisson à ce passionné de surf qui se détend en jouant sur l’orgue qu’il a bricolé avec des bocaux remplis d’eau. Si ces quatre pieds-nickelés ne brillent pas par leur intelligence, le film évite heureusement l’écueil des gags faciles et mise plus sur un humour absurde, chaque scène même la plus improbable étant jouée avec le plus grand sérieux. Dès lors, on s’étonne à peine de découvrir qu’à l’initiative de Pinback, l’équipage a recueilli un alien pour leur tenir lieu de mascotte. Que Dan O’Bannon parle et apporte un bol de soupe à cet alien qui est un ballon de plage avec des pieds palmés ne nous sort pas du récit bien au contraire. Dark Star déroule son univers absurde et enchaîne sans forcer les répliques et scènes cultes.
Un ballon de plage qui vient de l’espace, des bombes qui sont des objets sensibles qu’il faut veiller à ne pas vexer, des effets spéciaux kitchissimes, des costumes d’astronaute bricolés avec des plaques de muffin et des jouets pour enfants, tout cela est éminemment nanardesque mais fait avec un tel sérieux que la mécanique fonctionne à plein. Dark Star sous ses allures de parodie cite tout de même 2001 l’Odyssée de l’espace, Docteur Folamour, Ray Bradbury (dont une nouvelle semble avoir inspiré la fin du film) et Philip K Dick (lorsqu’il fait communiquer l’un des personnages avec un défunt). Quand ceux qui osent rire de tout ont autant de culture, on ne perd pas de temps à se laisser embarquer dans leur délire.