Le jeune Argel vit reclus dans une cabane perdue dans une forêt entourée d’un brouillard menaçant, avec son père, sa soeur Luciana et Marcos, son grand frère. Quand ce dernier disparaît mystérieusement, Argel va tout mettre en œuvre pour partir à sa recherche.
En 2014, The Voices faisait sensation à l’ouverture de la 20ème édition de l’étrange festival, l’emmenant à un niveau qu’il eut même du mal à maintenir. Quelques mois plus tôt, Daniel Castro Zimbron avait enfin pu boucler le financement de son deuxième long métrage, grâce à son passage à l’atelier de la ciné fondation du festival de Cannes. Cette année, c’est donc à The Darkness de recevoir les honneurs de la toujours électrique et très attendue séance d’ouverture de l’étrange festival. Passant en plus après une allocution d’Alejandro Jodorowsky qui a soulevé l’enthousiasme de la salle, les conditions étaient idéales pour que le film de Daniel Castro Zimbron puisse marquer les esprits. Si les entrées de cette séance d’ouverture étaient excellentes, malgré le très moyen court métrage « Decorado » qui faillit nous faire avaler de travers, il s’avère malheureusement que le plat principal ne fut pas à la hauteur, se révélant particulièrement sans saveur.
The Darkness est le deuxième film de la trilogie de la lumière commencée avec « Tau » en 2012 (dont le titre signifie soleil en huichol, un langage indigène de Mexico) et qui s’achèvera avec « The Shadow ». Au casting, on retrouve d’ailleurs Brontis Jodorowski, le fils aîné d’Alejandro, déjà présent dans Tau et qui le sera aussi dans The Shadow.
Avec un faux air de Peter Mullan, Brontis Jodorowky interprète le père de Marcos, Luciana et Argel avec lesquels il vit cloîtré dans une cabane perdue dans la forêt. Daniel Castro Zimbron nous emmène directement au coeur du quotidien de cette famille, sans aucune exposition nous expliquant le parcours de ses personnages, ce qui en soit n’est pas un défaut mais implique que « l’ambiance » du film nous happe sans nous laisser le temps de nous retourner pour voir les trous béants dans le scénario. A l’instar par exemple de Midnight Special, pour prendre un film récent qui est à notre sens un modèle en la matière.
The Darkness se donne toutes les peines du monde à installer son univers et c’est bien en cela qu’il pêche. Que ce soit le travail sur la bande son faisant du moindre bruit un élément de nature à créer un sentiment d’oppression, le choix de tourner entièrement en lumière naturelle et la lenteur très calculée de sa narration, tout est fait pour que le spectateur soit coincé, comme cette famille, entre les 4 murs de cette cabane.
Est-elle le dernier refuge dans cette forêt hostile, recouverte par le brouillard et dans laquelle on ne peut s’aventurer qu’avec un masque à gaz? Est-elle une prison voulue par ce père, semblant entretenir le climat de peur pour que ses enfants ne s’aventurent pas à vouloir en sortir? Le brouillard de la forêt s’étend jusque sur le scénario et cela a pour effet d’accentuer la claustrophobie voulue par la mise en scène. Faute d’avoir des débuts de réponse aux questions posées depuis le début de récit, se sentant sans cesse poussés du coude par la mise en scène, le temps paraît bien long et l’ennui est une menace plus concrète que cet ennemi invisible que l’on entend dans la forêt. Celle-ci n’est par ailleurs guère effrayante malgré des plans en contre plongée répétés sur ses gigantesques arbres et ce brouillard constant mais trop diffus pour être angoissant.
Les murs de la cabane peuvent bien trembler, le père se précipiter pour calfeutrer les fenêtres, on est bien loin du frisson qu’arrivait à procurer un film comme « The Mist ». Marcos, le fils ainé peut bien disparaître dans ce brouillard, après avoir semblé être sur le point de révéler un secret à Argel, cela semble si peu affecter son père, son frère et sa soeur qu’il est bien difficile de se sentir impliqué. On en vient à souhaiter qu’Argel concrétise enfin ses envies d’exploration de la forêt pour que le récit s’aère un peu et s’accélère, alors qu’on devrait plutôt craindre pour son sort et avoir envie de lui crier d’écouter son père et de ne pas sortir . On devrait également s’inquiéter de ce mal dont semble souffrir Luciana, petite fille quasi mutique, fascinée par les insectes, mais son personnage n’allant pas au delà de cette caractérisation, elle aussi finit par nous agacer. Quand le récit avance enfin un peu et que les intentions de Daniel Castro Zimbron se font malheureusement plus claires (parce qu’on a alors envie de se dire tout ça pour ça), il est déjà trop tard pour sortir de cette torpeur dans laquelle tout a concouru à nous plonger.
A tenter aussi lourdement de nous convaincre qu’il a quelque chose à nous révéler et qu’il va quelque part, The Darkness lasse très rapidement et ne parvient jamais à s’extraire de ce brouillard qui recouvre le scénario, les personnages et les intentions de Daniel Castro Zimbron.